Depuis un an des enquêtes journalistiques ont illustré la gabegie financière, parfois au-delà des obligations légales, liée au financement public des établissements privés sous contrat. A l’heure des débats budgétaires, alors qu’il est établi que ces établissements participent à la ségrégation sociale et scolaire de la jeunesse, aucun gouvernement ne peut échapper à l’impérieuse nécessité, pour le pays de réorienter, les fonds publics vers l’école publique laïque.
Dans leur cadre unitaire inédit depuis 30 ans, les organisations signataires de la tribune parue dans « Le Monde » du 30 janvier 2024, pour que l’école publique, laïque, gratuite et obligatoire soit la priorité du pays travaillent à la construction d’un plan de sortie du financement public de l’école privée. Face aux crises profondes il est plus que jamais nécessaire de faire société, l’école publique laïque doit donc recevoir les moyens de ses ambitions civiques et intellectuelles. Redonner espoir et ambitions à toute la jeunesse dans tout le pays, nécessite de concrétiser partout les visées émancipatrices de l’école publique laïque. Faute de moyens et d’ambition pour son développement, faute d’une défense véritable face aux attaques qu’elle a subies de la part des réactionnaires de tous bords, elle est aujourd’hui malmenée. Il est urgent que la République soutienne pleinement son école, la seule école de toute la jeunesse vivant dans ce pays.
Ces derniers mois l’incongruité de la gestion de ce financement est réapparue clairement, si ce n’est même dans certains cas son illégitimité voire son illégalité : publication des IPS en octobre 2022 démontrant les fortes disparités en termes de mixité sociale entre public et privé sous contrat ; rapport de la cour des comptes de juin 2023 sur le financement du privé sous contrat dénonçant le manque de contrôles, notamment sur l’utilisation de ces moyens; résultats des études sur les expérimentations de mixité sociale dans le public (travaux de Julien Grenet ou Youssef Souidi ) attestant des bienfaits scolaires de cette mixité pour tous les élèves ; rapport Vannier-Weissberg d’avril 2024 ; révélation des dotations de moyens affectées aux établissements privés supérieures à celles du public. Enfin, en septembre dernier, l’OCDE indique que les écoles privées bénéficient d’une plus grande part de fonds publics que la moyenne des pays de l’UE et de l’OCDE pour une même proportion d’élèves scolarisés.
Au regard de tous ces éléments et au delà des principes, les conditions dans lesquelles l’État applique (ou plutôt ne fait pas appliquer) les lois sont toujours plus inconcevables. La ségrégation sociale et scolaire provoquée par l’enseignement privé sous contrat ne peut plus être ignorée. L’argent public doit permettre aux services publics, ici à l’École publique, de renforcer sur tout le territoire national l’égalité dans l’accès aux savoirs, donc les perspectives d’émancipation pour chaque élève, à rebours du financement d’un séparatisme avéré. Nous réaffirmons la liberté de l’enseignement laissée aux citoyens. Cette liberté implique l’existence et l’ouverture d’écoles, collèges et lycées publics partout où ils sont absents ou leur nombre insuffisant. Au regard du principe constitutionnel intégré dans le Code de l’Éducation : « l’enseignement public, gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’État. »
Afin d’élaborer une ou plusieurs voies de sortie de ce financement, nos organisations conçoivent ces plans de manière collective et partagée. Notre but est qu’ils soient réfléchis en tenant compte du cadre constitutionnel et juridique mais aussi qu’ils respectent les droits de chacun (agents et usagers). Nous travaillerons avec des parlementaires et des spécialistes qui voudront s’associer à notre démarche.
Ensemble, nous porterons notre projet auprès de l’opinion publique, des élus et des gouvernements, pour construire le rapport de force nécessaire à sa réalisation.